Billet d’humeur – La tête dans le sable

L’Europe !! Bruxelles… Le Parlement Européen, la Maison de l’Europe, … Qu’on le veuille ou non la majesté des institutions contribue à l’image qu’elles véhiculent et, par-là, à leur crédibilité. La Maison Blanche, le palais de l’Elysée, le Kremlin,… même le modeste 10 Downing street à Londres sont autant de lieux chargés d’histoire qui en imposent et forcent le respect. Partout les ors brillent, les cuivres rutilent. La réalité du pouvoir et sa permanence,au-delà de la ou des personnes qui l’incarnent à un moment donné, sont là,comme inscrits dans les murs. Ces lieux sont à l’image du drapeau qui, en général, les surmonte. Ils incarnent l’Etat, la nation, notre bien commun,notre histoire commune. Rien d’étonnant donc à ce que ces temples du pouvoir soient abondamment visités et fassent l’objet de véritables pèlerinages.

Donner corps à l’Europe avec quelque chance de succès supposait donc de l’incarner, elle aussi, dans la pierre. Aucune raison pour que les règles qui prévalent ailleurs ne s’appliquent pas ici aussi. Sauf, bien sûr, à vouloir ôter toutes chances aux institutions européennes de s’imposer,un jour, comme le centre effectif du pouvoir en Europe…

Et justement ! Le quartier de l’Europe à Bruxelles s’apparente, ni plus n’y moins, à un ensemble de bureaux. Bâtiments d’acier et de verre imbriqués les uns dans les autres, ni beaux ni laids, juste semblables à tous ceux que l’on trouve dans les quartiers d’affaires qui essaiment de par le monde depuis quelques décennies. Il est clair qu’ici on ne prétend pas faire rêver. Au mieux cela est efficace et fonctionnel. Au pire cela symbolise une bureaucratie sans âme, anonyme, désincarnée, loin des préoccupations des peuples que tout cela est supposé représenter. Nombre de nos Préfectures et autres Conseils Généraux, malgré la modestie de leurs prérogatives, sont installés dans de tout autres meubles et immeubles…  

L’on rétorquera sans doute que l’époque n’est plus aux ors qui brillent ni même aux cuivres rutilants. Qu’il convient d’être économe et humble. Soit, pourquoi pas, même si l’on m’accordera que l’Europe, avec toutes les difficultés qu’on lui connait, aurait sans doute eu beaucoup à gagner d’une incarnation immobilière à la mesure de son histoire et à la hauteur du rêve qu’elle était supposée porter.

Efforçons nous, néanmoins, d’être positifs et portons notre regard alentour afin de discerner, peut-être, la symbolique sous-jacente de tout ceci.

Face à l’entrée du bâtiment du Parlement européen réservée aux visiteurs, un petit square. Dire qu’il est modeste, lui aussi, est très en dessous de la réalité. Quelques dizaines de mètres carrés piqués de maigres arbustes et livrés aux mauvaises herbes… Le tout dans un état d’abandon manifeste.  Au milieu, disposées çà et là, des sculptures.Mais pas n’importe lesquelles. Ici nulle statue évoquant l’amour ou la paix,voire la fraternité des peuples. Rien qui illustre, non plus, la grandeur de l’Europe et la richesse de son passé. Non, rien de tout ceci. Des autruches – une douzaine peut-être – modelées dans le bronze et, figées comme il se doit, la tête dans le sable… Fesses en l’air, donc. Cela ne s’invente pas.  A supposer qu’il y ait effectivement ici un symbole, il est sans doute préférable de ne pas savoir lequel. 

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